Camille Nénault, le comique légumier qui réinvente l’absurde
Un prodige du stand-up ou un délire potager ?
L’humour, c’est comme la cuisine : certains aiment les plats raffinés, d’autres se contentent d’une bonne vieille salade composée. Camille Nénault, lui, a choisi une voie plus radicale : le comique légumier. Une école de pensée où les jeux de mots sur les tomates, les avocats et autres cucurbitacées deviennent les ingrédients d’une performance aussi improbable qu’addictive. Un concept qui fait lever les sourcils des puristes et hurler de rire une frange de spectateurs fascinés par ce puits sans fond de l’absurde.
Dupieux en stand-up ?
Si Quentin Dupieux réalisait du stand-up, il s’appellerait peut-être Camille Nénault. Comme chez l’auteur de Réalité et Mandibules, l’absurde ne sert pas ici de simple ornement comique, il devient un système, une logique du non-sens où chaque phrase pourrait être une fausse piste. Le public attend une chute, mais l’attend-il encore après une minute de digression sur la psychologie existentielle d’une courgette ?
On pense à Andy Kaufman, ce performeur qui testait la patience de son public en récitant The Great Gatsby au premier degré, juste pour voir qui décrocherait en premier. Sauf que chez Nénault, il y a une chaleur sous la loufoquerie, une sincérité derrière le grotesque. Un peu comme si un enfant se retrouvait projeté sur scène avec une compréhension instinctive du comique, mais aucun respect pour ses codes.
Chaplin et la dure loi du rire
« Si vous ne rigolez pas aux Temps modernes, vous ne rigolerez jamais à rien. » Voilà ce que déclarait Camille Nénault du haut de ses huit ans, avec l’aplomb d’un vieux briscard du stand-up. L’enfant prodige savait déjà ce que bien des humoristes mettent une carrière à comprendre : le rire est une mécanique impitoyable. On rit ou on ne rit pas, et si ça ne fonctionne pas, c’est que l’humoriste a raté son coup.
Et pourtant, Nénault prend tous les risques. Des sketches sans punchline évidente, des monologues qui ressemblent parfois à des démonstrations mathématiques absurdes : « Un avocat, c’est un fruit, mais c’est aussi un monsieur en robe. Mais est-ce qu’un avocat en robe peut être aussi mûr qu’un avocat dans un sac plastique ? » Là où d’autres fonceraient dans le mur, lui persiste, étire la corde, pousse le malaise jusqu’à ce qu’il devienne hilarant.
Ricky Gervais for kids ?
La comparaison revient souvent. Comme Gervais, Nénault joue sur les silences, les décalages et le malaise feint. Mais alors que Gervais s’appuie sur la provocation, son homologue en culottes courtes construit un humour à double fond. Un mélange d’innocence et de précision chirurgicale, un sens du rythme qui semble inné.
Un enfant qui théorise le rire en même temps qu’il l’expérimente ? Un comédien qui cite Sheldon Cooper et Sherlock Holmes comme influences ? Un stand-up qui pourrait tout aussi bien être un one-man-show dadaïste ?
Camille Nénault n’a peut-être pas encore l’étoffe d’un Chaplin ou d’un Kaufman, mais une chose est sûre : il est déjà une anomalie dans le paysage comique. Un prodige ou un canular ? Peut-être les deux à la fois. Mais après tout, qui se soucie des étiquettes quand on rit ?
Chad Geppetto
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